Son premier argent de poche ?

l'arrivée fracassante de l'argent dans la tête de nos enfants

Le souvenir de la rentrée scolaire s’effaçant progressivement, On s’essaie à une routine plus ou moins réglée. Les grands commencent à rentrer tout seuls de l’école, ou partent avec la voisine à pied. Une nouvelle autonomie qui s’illustre parfois par une question avant  le cours de musique du jeudi soir :

Maman, je peux avoir cinquante centimes pour m’acheter un chocolat chaud au conservatoire ?

Enfin si on est chanceux… On peut aussi avoir droit à la version « rebelle » de la demande… C’est-à-dire se rendre compte une fois rentrés des courses que cette pochette de Pokemon là, celle qui vient de tomber du manteau de votre ainé, vous ne l’avez pas acheté… Dans ce cas là, après un retour de ladite pochette au vigile du supermarché par votre chérubin,  il faudra réfléchir au message sous-jacent de ce qu’il vient de se passer :

« N°1 a besoin d’argent ! »  

Ceci étant, on va laisser passer quelques semaines/mois. Parce que c’est bien tout ça, mais on ne va pas « recompenser » le vol de Pokémon par de l’argent poche ! Mais le message est quand même là et l’ignorer ne va pas nous aider.

Après réflexion, de quoi N°1 a besoin ?… Non, disons envie ? Oui il a des besoins, mais admettons que vous vous occupez de cela. On retombe dans « l’envie » et on élargit le champ des possibles : Un bonbon en sortant de l’école, le dernier « Mortelle Adèle », offrir un cadeau à Mamy et de tout ce qui croise son regard et qui est « trop mignon » … C’est d’ailleurs justement pour ça qu’on fait très attention à la somme à donner pour ne pas se retrouver avec :

  • Quinze caries au prochain contrôle dentaire
  • Et surtout un trop grand nombre de jouets débilitants (n’ayons pas peur des mots) dont vous ne voulez pas… j’ai nommé les balles gélatineuses emprisonnées dans un filet qui sorte du dit filet lorsqu’on les écrase et qui finissent toujours littéralement explosé dans les cartables… inondant les cahiers de masse gélatineuse pailletés, les pop it de toutes les formes/couleurs (mais dont vous n’avez toujours pas compris le principe), les gommes licornes qui ne gomment rien…et j’en passe.

On s’autorise donc quelques limites, tout en laissant une liberté assez grande. Parce qu’il y a un double intérêt dans l’argent de poche. L’autonomie, mais aussi l’expérimentation…l’un nourrit l’autre de toute manière. On laisse donc dans un premier temps expérimenter la vacuité de certains objets pour en épuiser l’intérêt. Ça marche… parfois.

On peut s’aider d’une petite discussion intéressée sur la vie de l’objet, son état actuel et de son intérêt véritable sur le long terme. Cela lui permettra de réfléchir différemment pour son prochain achat. Au milieu de tout ça, un dimanche matin alors que vous avez besoin de beurre pour faire des gaufres, vous partez avec N°1 à l’épicerie du coin de la rue (celui en face du cours de danse) et là le vendeur que vous ne connaissez pas, tape la discut avec N°1 en l’appelant par son prénom… C’est le moment où vous apprenez que N°1 s’y arrête tous les mercredis après son cours de danse pour acheter un bonbon à 20 centimes…

On se rend donc compte qu’il y a la théorie et la pratique. Cependant, on garde la verbalisation de la théorie, si ce n’est pas super efficace de suite, cela infusera petit à petit comme toute chose dans l’éducation. Et il est fort probable que dans 1 ou 2 ans au détour d’une porte, vous entendiez N°1 donner ses bons conseils à N°2 sur la façon de gérer son argent de poche. Même si N°1 en est encore à tout dépensé la semaine même… selon le principe « je vois le meilleur et je l’approuve, mais je fais le pire… » Ça date d’Ovide, mais malheureusement c’est toujours un peu vrai…

Autonomie et expérimentation

L’argent de poche n’est pas une rémunération, donc ce n’est pas en retour d’un travail.

D’autre part, donner de l’argent à son enfant parce qu’il participe aux tâches ménagères fait passer le message que cette aide n’est pas implicite… Or il est important de maintenir l’idée que participer aux tâches domestiques fait partie de la vie familiale et non une fleur qu’il vous fait. Sinon, vous pouvez être quasi sûr qu’à l’adolescence il ne fera plus rien, si ce n’est pas déjà le cas.

Idem en ce qui concerne le travail scolaire, on ne rétribue pas les « bonnes notes » à l’école. Les enfants encore jeunes ont souvent la tendance naturelle de « travailler à l’école » pour faire plaisir à la maitresse, maman ou papa voire les deux. Or il est important qu’ils comprennent qu’ils travaillent pour eux-mêmes… ni les parents ni pour avoir quelques pièces en fin de semaine.

Si vous tenez absolument que l’argent que vous donnez à votre enfant puisse répondre à  « tout travail mérite salaire » :

Faites-le participer alors à une tâche non usuelle du quotidien : ex : un ménage de printemps, ranger le garage, trier les vieilles affaires… Mais cela doit rester exceptionnel. Ce n’est pas donc pas de l’argent de poche.

D’autre part, on ne punit pas d’argent de poche…Cela pourrait être compliqué d’établir une limite et d’autre part, il serait judicieux de ne pas faire de l’argent un potentiel problème entre vous et votre enfant. Maintenant… Et plus tard.

Cet argent de poche, c’est un pas de plus vers l’autonomie. On peut s’en servir pour valoriser le fait qu’il grandisse.

« Maintenant que tu es grand, tu as 8 ans. Tu peux commencer à avoir de l’argent de poche»

Regle numéro 1 : se fixer sur un montant et ne pas en déroger. Si l’objectif est de lui apprendre la valeur de l’argent et du concept« un effort maintenant pour un plaisir plus tard » il va falloir résister à ses manœuvres d’amadouement pour avoir une rallonge : « Parce que je veux trop ces cartes Pokémon, mais j’ai déjà acheté des bonbons… » . Généralement c’est ce qu’il se passe au début. L’enfant est trop content d’avoir qq euros en poche et aura l’impression d’être « super riche ». Il ne fera donc pas attention à la dépense. Après un petit mois, il se rendra vite compte que s’il achète un bonbon tous les soirs, il ne lui restera plus rien pour ce LEGO qu’il lorgne dans la vitrine tous les soirs en rentrant de l’école…

L’objectif est d’amener à la réflexion. Pour cela, il faut expérimenter, se tromper, regretter et évoluer dans son comportement.

Nous n’apprenons que très peu de l’expérience des autres… On écoute, on acquiesce parfois, mais finalement lorsqu’on ramène la situation à soi… « Ce n’est pas pareil ». (C’est une sorte de dogme dans la psyché humaine. C’est vrai au niveau individuel, c’est aussi vrai au niveau sociétal. Nous aurions une Histoire différente au niveau international si nous étions capables d’apprendre des erreurs passées des autres… ) Tout ça pour dire que chacun d’entre nous a besoin d’expérimenter sa propre vérité. N°1 va donc tout dépenser ses premiers € en bonbons gélifiés en forme d’œuf…

Cependant pour aider n°1 à prendre un peu d’avance sur le process on peut lui proposer de l’emmener à une « journée course » et lui dire qu’il a droit à une seule chose dans la journée. Il choisira probablement le premier truc qui l’intéresse, et regrettera dès qu’il aura vu un truc « plus mégagénial »… mais cela sera trop tard. Il n’est bien sûr absolument pas pertinent d’acheter ce second coup de cœur ! Même en douce pour lui donner un autre jour. C’est non ! Cela enverrait le message que, peu importe ce qu’il choisit, il peut toujours avoir autre chose après… et croyez-moi, on ne veut pas envoyer ce message. Si vous résistez à la tentation, la prochaine fois il aura en mémoire le petit jouet qu’il n’a pas pu vous demander parce qu’il avait déjà choisi autre chose de moins bien avant.

Cela permet d’apprendre à ne pas trop se précipiter.  

Combien pour un premier argent de poche ?

Tout d’abord à 8 ans, il faut garder une fréquence hebdomadaire ; la notion du temps commence à s’affiner, mais une temporalité mensuelle pour gérer qq euros est trop longue à cet âge et du coup trop abstraite. La « leçon » d’achat du mois précédent sera quasi oubliée.

Une semaine est plus facile à appréhender. Dans la répétition des jours et des activités du quotidien, ce sera bien plus concret. Et bien plus présent dans sa mémoire pour la semaine suivante.

L’idée c’est d’avoir accès aux petits jouets et petit livres à partir « d’une semaine d’économie » et qu’avec l’argent de poche de la semaine 2, il puisse avoir accès à ce dont il a envie à environ 5,6 €.

On peut commencer donc par 2/3 € par semaine et voir ce que cela donne.  

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