Comment gérer le harcèlement scolaire ?

COMMENT GERER LE HARCELEMENT SCOLAIRE ?

C'est quoi exactement le harcèlement ?

On y croit chaque année, mais systématiquement septembre n’est que déception. Quelques jours seulement après la rentrée, le bal des consultations « harcelement » se suivent et se ressemblent. De la maternelle jusqu’au lycée (parfois même le troisième cycle), les écoliers/élèves, tous ont la même plainte… la même inquiétude de retourner en classe où ils vont se faire harceler/humilier/embêter (au choix  en fonction de la sémantique de chacun) et qui peut déboucher sur une véritable phobie scolaire.
  • On va me dire qu’ils aiment pas comment je suis habillée
  • Tu sais je fais de l’humour et elle ne comprend pas, alors elle dit que je suis bête. Elle a dit « Tiens la bête ! »
  • Personne ne me parle
  • Il se moque de mes lunettes/de mon appareil dentaire, ils disent que je suis moche
  • Ils veulent pas me parler parce que j’ai des « habits de naze »
  • Elles me font peur. J’ai peur qu’ils se moquent de moi parce que j’ai redoublé/sauté une classe/les cheveux roux/noirs/blonds/ les oreilles pas bien/la voix trop aiguë/grave…
  • Ils ne font que m’humilier ! dit Martin
  • Elle m’empêche de discuter avec les autres élèves de la classe, je suis toujours toute seule.
  • Ils m’ont bloqué à la sortie des toilettes et m’ont jeté par terre
  • Ils disent que je mens quand je dis que j’ai pas de maman.
C’est comme ça que l’on se retrouve avec un petit bout (plus ou moins petit) qui pleure tout seul dans sa chambre parce qu’il ne veut pas retourner le lendemain dans cette classe qui le terrorise. Ou qui passe son temps à martyriser son petit frère/sœur de la frustration que cette situation généré. (Ce qui n’est fondamentalement pas mieux)

Dans ce genre de situation, on pourrait assez facilement se dire qu’il y a un gentil d’un côté et un méchant de l’autre… ce n’est pas toujours aussi clair que ça. Et malgré l’auréole de sainteté que l’on positionne de fait sur nos chères têtes blondes/brunes, pensons bien qu’ils peuvent être le calvaire d’autres enfants à l’école.


D’autant plus qu’être un harceleur n’est pas forcément dans une volonté de faire du mal. Selon le principe de « l’attaque est la meilleure défense » (ça reste sujet à discussion), certains enfants vont se moquer d’autres pour éviter que l’on s’en prenne à eux, avec la croyance que :  

« Me moquer de quelqu’un permet de se sentir supérieur.
Je le considère comme nul, donc par définition je suis meilleur que lui. » 
Ce qui peut expliquer les choses ne les excuse en aucune manière. Dans un monde idéal (oui il n’y aura pas d’harcèlement) Il serait une bonne chose de se pencher également sur son profil et son environnement.
L’école permet à nos enfants de « tester » une autre version d’eux même. La majorité aura un comportement assez similaire à la maison et à l’école, mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Certains qui pourraient se sentir enfermé dans un « rôle » à la maison peuvent ainsi « s’essayer » à autre chose à l’école. À noter que ce n’est d’ailleurs pas toujours négatif. Typiquement le petit dernier de la fratrie qui devient leader à l’école.   En d’autres termes : Soyons attentif et partons du principe qu’évoquer la thématique du harcèlement avec nos enfants reste pertinent quoi qu’il arrive.

En tant qu’adulte naïf sur la thématique, on a en tête l’enfant qui se fait taper à l’école pour une raison x,y ou z, mais cela peut être bien plus insidieux que cela. Et il est important de prendre le temps d’évoquer toutes ces petites choses qui peuvent faire mal, comme :

  • De « Ton pull est moche » à « binoclar »
  • des bousculades répétées,
  • se moquer, rigoler quand Martin participe en classe
  • refuser de travailler en groupe avec un des camarades de manière répétée
A noter que le « t’es plus ma copine » qui revient un jour sur deux n’est pas une bonne chose non plus. Il faut alors faire la distinction entre le harcèlement et une amitié toxique, mais il est tout autant primordial de mettre en évidence la souffrance que les deux génèrent et aider l’enfant à traiter le problème.

Dans la vraie vie « IRL », mais aussi sur internet, les réseaux sociaux voire les groupes what’s app de la classe…

Harcèlement et cyberharcèlement sont tout autant dommageables l’un que l’autre, même si le cyberharcèlement est plus insidieux et parfois plus lent à identifier.

Ceci dit « grace » a la covid19, l’outil numérique a pris une place de plus en plus importante dans les enseignements de nos enfants. Au sein des lycées, collège mais également les écoles élementaires, ce qui favorise largement la communication numérique entre les eleves… et pas toujours de manière adaptée et bienveillante. 

Donc soyons vigilants. D’autant plus, vis-à-vis et envers les filles… Oui je sais, cela ne devrait pas être un sujet mais sachez que dans le monde merveilleux de 2023, 73% de la gente féminine à travers le monde est victime de violence numérique… 

Du cyberharcelement à l’insulte anonymisée, c’est tout un univers des possible qui se décline… bien au chaud derrière un écran : un « #SaleP… » qui peut rapidement devenir dévastateur.

Destructeur parce qu’il touche un être en plein développement, où le « soi » n’est pas encore assez opérant pour savoir faire la distinction entre une vérité fondamentale (une vérité absolue) et ce qui n’est qu’interprétation et/ou manipulation. Une estime de soi en pleine construction qui la rends très/trop sensible au regard de l’Autre.  Ce qui fait du harcelement un evenement pouvant ébranler les fondations de la personnalité d’un individu et avoir un impact sur le reste de sa vie.

Un enfant harcelé à l’école c’est un enfant qui part apprendre dans un environnement hostile, autant dire que rapidement les apprentissages seront impactés et passeront au second plan pour laisser place à l’angoisse de se rendre à l’école.

C’est comme ça qu’il arrive d’observer un bon elève qui en quelques semaines refuse de travailler, avec des notes qui dégringoles sans pour autant s’en émouvoir… puisque finalement cela lui permet de ne plus se faire moquer : d’intello/fayot/premier de la classe… Il se fond dans la masse, il n’est plus la cible. Cela reporte cependant les tensions dans le milieu familial.

On en parle ?

Parler du harcèlement à la maison avec nos enfants, c’est la meilleure manière d’éviter d’en faire un sujet tabou. Parler du secret qui généralement l’entoure et isole la victime dans sa détresse. Le harceleur a ainsi deux caractéristiques ; il s’attaque à plus petit/faible que lui (Il cherche la domination, mais n’est pas sûr de lui. Cibler des élèves de plus petite classe est ainsi une bonne façon d’avoir peu de résistance) et il s’assure que personne ne viendra menacer sa position. Il est le plus souvent discret dans les actes, mais ouvertement dans la menace :

« Si t’en parle à tes parents, je te casse la tête/je les tue/… »

C’est le plus sur moyen que sa victime s’enferme dans le silence, de peur d’être responsable de ce qui pourrait arriver à sa famille et ses amis. Cela s’appuie sur le principe très fort de la pensée magique. 

Parler est une bonne chose, mais à qui en parler ? Pour que Martin puisse demander de l’aide, il faut déjà qu’il sache qu’il en a le droit et que sa parole puisse être entendue.

 

Il peut en parler à un adulte de son choix, de confiance. À l’école, la maitresse, la personne qui surveille la cantine, l’animateur, ses parents bien sûr ou qq.’un de son entourage qui pourra contacter l’école.

S’il n’y a personne autour de Martin, un ami peut faire l’affaire ou encore il peut appeler le numéro vert : 3020. « Non au harcèlement » qui pourra l’écouter et trouver une solution pour que le harcèlement s’arrête. 

 

Et le 3018 pour les situations de cyberharcèlement. cliquez ci-dessous : 

Lorsque l’on détecte un harcèlement, oui on peut proposer un suivi psychologique à la victime… Mais attention à ce que cela ne soit pas la seule mesure mise en place. Il faut faire cesser le harcèlement. Envoyer un enfant chez le psy pour harcèlement sans que celui-ci cesse revient à lui dire :
« C’est toi le problème. tu n’avais qu’à pas être moche/petit/timide/roux/avoir des lunettes… »
S’il est bien sûr pertinent pendant ces séances de travailler l’estime et la confiance en soi, sa relation à l’Autre, Il est tout aussi primordial que l’enfant constate qu’il y a un réseau autour de lui qui est là pour l’aider à sortir de cette impasse : ses proches, sa famille, son établissement et la loi. L’accompagnement par la famille et les proches est fondamental, pour restaurer l’estime et la confiance en soi. Première chose : ne pas remettre en cause sa parole. (Si doute il y a, l’aborder à un autre moment) Pouvoir échanger, verbaliser les émotions, le ressenti, la colère et l’injustice de cette situation. Oui le psy c’est bien, mais la première ressource est bien la famille, les parents.

Je rencontre trop de jeunes et moins jeunes qui ont été victimes de harcèlement sans avoir pu en parler. Ou pire… Qui en parle, mais sans que cela ne change la situation. Il est primordial de faire évoluer la situation de harcèlement lorsque votre enfant/élève ose finalement prendre la parole. S’il ne se passe rien, le message qui va passer à votre enfant/élève sera le suivant :

« Quand tu as un problème, ce n’est pas la peine d’en parler. Personne ne peut rien pour toi. Tu dois te débrouiller seul. Moi ton parent, je ne suis pas capable de te protéger ».

Ce n’est évidemment pas un message que l’on veut donner à son enfant. Et d’autre part, cela donne un message d’impunité à l’harceleur qui le conforte dans un sentiment de toute-puissance…  Ce qui reste problématique.

Et après, on peut faire quoi exactement ?

Rapidement après avoir accueilli la parole à la maison, il est important d’en parler à l’établissement scolaire. On peut être tenté d’aller voir les parents du harceleur, mais ça peut assez rapidement mal tourner. Or, pour résoudre une situation de harcèlement, il est important de ne pas s’inscrire dans le registre de l’émotion. 

Donc on délègue d’autant plus que les établissements ont une obligation de moyen pour prévenir et traiter les cas de harcèlement. Si cela ne suffit pas  et que l’établissement échoue a offrir à votre enfant un environnement scolaire serein et bienveillant (oui, soyons optimistes)  n’hésitez pas à gravir un échelon et aller porter plainte au commissariat.


On hésite pas, depuis le 2 mars 2022 a adopté un nouveau texte de loi caractérisant de délit le « harcèlement scolaire » avec des peines maximales encourues de 10 ans de prison et de 150 000 d’euro d’amendes (dans les situations extrêmes). Si l’objectif n’est pas d’en arriver là, il est clair que la reconnaissance du « droit à la une scolarité sans harcèlement » est primordiale. 

Concrètement, il est fort peu probable qu’il arrive quelque chose (judiciairement parlant j’entends) au harceleur, mais une petite discussion avec un OPJ aura toujours plus de poids qu’une visite dans le bureau du CPE dont certains élèves (tous ?) se contrefichent allégrement.

S’il vous semble que le commissariat pourrait ne pas vouloir enregistrer votre plainte, vous pouvez toujours remplir une préplainte en ligne ici : 

In fine, l'important ?

On l’aura compris, le harcèlement scolaire peut être dévastateur sur le court terme, mais également sur le long terme. Pour contrer cela,  il est primordial de savoir répondre présent rapidement… faire bouger les leviers nécessaires (ecole/plainte) et d’accompagner son enfant dans une réassurance et estime de soi pour éviter les failles narcissiques qui pourraient persister.

… gérer, éviter, prévenir le harcèlement c’est un combat de longue haleine. Ce n’est malheureusement pas le seul piège que l’on peut rencontrer dans la vie scolaire et son environnement. On parle écrans, manque de sommeil et valorisation des acquis pour commencer/continuer l’année scolaire de manière plus sereine. à lire ci dessous : 

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