Insomnie… mais où est passé le sommeil ?

De plus en plus on se plaint de son absence. On le cherche, on s’inquiète de ne plus le trouver et jour après jour on dépérit de sa disparition…  Les plus chanceux peuvent s’en jouer, faire semblant de l’ignorer et le retrouver fidèle au poste la nuit suivante. Mais tous n’ont pas ce luxe… Parce que c’est ce qu’il est devenu ; un luxe que l’on croyait acquis au point de ne pas y faire attention. Jusqu’au jour où il nous lâche sans crier gare… Lui dirait que cela fait des années qu’il nous envoie des signes que nous ne voulions pas voir, que nous le challengeons sans vergogne. Une vie où il n’a plus sa place. Choyé jadis, délaissé aujourd’hui… il s’en va.

 Mais au fait, c’est quoi le sommeil ?!

Au même titre que notre alimentation et la respiration, le sommeil fait partie des contraintes de notre humanité. Un indispensable, même si chacun de nous avons notre propre contrat avec Morphée. Certains ont besoin de 10h de sommeil par nuit, lorsque d’autres se contentent de 5h. Il y ceux qui aiment se coucher tôt et ceux apprécient par-dessus tout la grasse matinée. Le problème au milieu de tout cela, c’est que notre rythme de vie n’est plus du tout adapté au rythme naturel de notre sommeil.

Il n’est pas question de nier le caractère pathologique de certaines insomnies. D’ailleurs pour ceux qui s’en inquiète, on peut toujours explorer le réseau Morphée qui propose des évaluations et questionnaires sur notre sommeil de 0 à 77 ans… c’est par là :

Cependant avant de médicamenter (prendre des somnifères est globalement non pérenne) on peut repartir des bases sur lesquelles s’est construit le sommeil. Et par conséquent se pencher sur le concept d’hygiène du sommeil.  D’autant plus qu’avant d’avoir un rendez-vous dans un laboratoire du sommeil (parce que là-bas aussi, on manque de personnel médical), on a largement le temps d’explorer le concept. 

L'hygiene du sommeil

L’hygiène du sommeil c’est un peu comme remettre d’aplomb tous les rouages d’une horloge. Ça tombe bien, le sommeil c’est une histoire d’horloge, même plutôt deux d’ailleurs.

La première,  l’horloge « circadienne ». Fonctionne toute seule sur un rythme d’à peu près 24h qu’il nous faut resynchroniser tous les jours. Une sorte de mise à jour automatique qui s’opère sous les UV des rayons du soleil, un peu comme Wall-E en somme. Une partie de nous fonctionne à l’énergie solaire, notre physiologie est en avance sur la transition énergétique, d’autant plus que cela fonctionne même en plein janvier sous le ciel gris de Lille (pardon les Nordistes). En revanche il nous faut bel et bien sortir à l’extérieur parce que nos jolies fenêtres du XXI nous protègent bien du froid, mais aussi des UV. Mauvaise pioche pour notre resynchronisation donc ! Bref il nous faut nous motiver pour sortir !

La seconde est l’horloge homéostatique qui est conditionnée par les « donneurs de temps » : L’alternance jour/nuit, les heures des repas, du réveil, les rythmes sociaux en général… En résumé, des habitudes ! On pourrait dire que ce n’est pas important, mais malheureusement pour nous, ce système homéostatique est responsable du coup de balai des hormones de l’éveil… pour laisser place au sommeil ! C’est donc primordial. Et c’est bien en changeant les habitudes que l’on peut avoir un impact sur un sommeil aujourd’hui disparu. En 50 ans nous dormons 1h30 de moins… Notre mode de vie a changé trop vite pour que notre rythme ait eu une quelconque chance de s’adapter. Nous sortons tard du travail (parfois hostile, souvent pénible), avons parfois 1h30 de trajet, le télétravail qui nous fait confondre espace de vie et espace de travail, prendre un petit apéro le soir en rentrant pour décompresser, réviser les cours des partiels dans le lit ou bien y regarder une série, vérifier les mails du boulot (juste par habitude) au moment de poser le téléphone sur la table de nuit, vivre dans le bruit incessant et dans la lumière permanente… Rien de tout ça ne nous aide à bien dormir. C’est même plutôt l’inverse… Un schéma qui n’est pas un problème lorsqu’il est sporadique entraine insomnie d’endormissement et rumination anxieuse dans sa répétition, créant un cercle vicieux.

Retrouver le sommeil

C’est quoi le programme qui permet de retrouver le sommeil ? Tout d’abord il nous faut tabler sur la régularité et la pérennité. On ne retrouve pas le sommeil en 3 nuits, c’est un travail sur le long terme. Et c’est tout l’enjeu du changement… Nouvelles habitudes !

De manière assez intuitive, on peut se dire qu’il y a besoin d’activité physique pour bien dormir et c’est le cas. Une fatigue physique (notez que je ne parle pas de sport, mais d’activité physique) favorise l’endormissement, lorsque la fatigue psychique est insomniante. Il est assez aisé de descendre à une station ou deux avant son arrêt et faire le reste en marchant, prendre l’escalier plutôt que l’ascenseur, prendre le vélo pour aller travailler (oui, même en zone rurale, les élus servent à ça : changer les choses). À noter que l’objectif du vélo n’est pas de faire le tour de France chaque matin et d’arriver rouge et en sueur au bureau. Mais bel et bien de s’en servir comme d’un moyen de transport tout en faisant un minimum d’activité physique qui distille endorphines et bonne humeur au quotidien. D’autre part, cela coche également la case « lumière du jour » qui remet à l’heure notre pendule circadienne, c’est donc doublement bénéfique (voire plus, mais on en parlera une prochaine fois) !

Dans la journée, on essaie de garder un rythme, de voir des gens, de sortir au moins une fois par jour. Toujours relatif à notre besoin de lumière, mais aussi parce que nous sommes un animal social… et qu’à force d’être seul à la maison face à un écran (merci le télétravail), on va finir par trouver le silence assourdissant.

Le télétravail peut être, il est vrai, une facilité logistique, mais pour les petits espaces cela complique les choses. Travailler dans sa chambre, parfois sur son lit, risque de rendre plus flou le message au moment de sauter dans son lit. Le cerveau va finir par se demander si l’objectif est de travailler ou de dormir. Même combat lorsqu’on a pris l’habitude de finir la journée par une « petite série » (est-ce que Walking Dead prédispose réellement au sommeil ?).  Sans compter le petit côté anxiogène distillé par les films et séries de plus en plus glauques, les écrans qui nous les projettent (trop proche des yeux) sont pleins de lumière bleue qui n’a qu’un seul objectif : freiner notre sécrétion de mélatonine. La mélatonine c’est cette hormone du sommeil que notre cerveau sécrète lorsqu’on est dans l’obscurité… C’est pourquoi les écrans sont un problème, mais aussi l’éclairage public de haute intensité qui éclaire comme en plein jour notre chambre (merci la commune).

On termine donc la journée, dans une lumière douce (si possible dans les tons chauds), sans trop de bruit (oui c’est un vœu pieux, la pollution sonore est une plaie invisible…) et sans alcool. Désolée le verre du soir pour « décompresser » ne nous aide pas… Au début, on a l’impression que cela peut « faciliter » l’endormissement, mais en fait c’est plutôt le côté anxiolytique de l’alcool qui travaille. Mais petit à petit, il faudra une dose plus importante pour avoir le même effet… et in fine on a une consommation d’alcool plus importante qui va perturber la seconde partie de la nuit, mettre le bazar dans notre sommeil paradoxal… bref beaucoup d’agitation et cauchemars à la clef. On évite également le café et/ou le thé de la fin d’après-midi pour des raisons évidentes.

Une nuit pour tout changer

Un dernier détail… Le moment du coucher doit être notre meilleur moment de la journée.Peu importe qu’elle ait été la teneur de notre journée, il faut que le moment de se mettre au lit soit littéralement un « petit bonheur ». Cela veut dire qu’il faut peut-être remanier sa chambre. Si je suis de prédisposition anxieuse, je me débrouille de mettre le lit face à la porte, je prends un lit sans dessous de lit, un dressing sans porte (ou j’aménage la penderie pour qu’il n’y ait pas d’espace résiduel où mon inconscient peut imaginer des choses… ben oui, on vient de regarder « Walking dead » !). D’autre part, c’est probablement le moment d’investir dans des draps en coton chaud, qui sont chauds même en plein hiver, même si vous dormez seul(e). Que l’on peut conjuguer avec une chochotte (une petite bouillotte de grain de lin), que l’on met dans le lit le temps de prendre la douche et que l’on enlève après pour que cela ne soit pas trop chaud… les pieds n’aiment pas avoir trop chaud pour dormir. Dans le même esprit, on anticipe sur les canicules de l’été prochain (effectivement, je ne suis pas optimiste pour 2024, comment l’être ?) en récupérant les draps en vieux coton de votre trisaïeule (lourd & brodé de blanc à ses initiales) qui restent frais quoi qu’il arrive. On rajoute une petite lampe de chevet (et pas un spot LED), une liseuse… un roman, un essai ou une BD et on lit une petite vingtaine de minutes, après quoi on peut éteindre la lumière sans craindre l’absence de Morphée. On se reconstruit un rituel du coucher en quelque sorte.

Bien sûr on ne regarde pas son téléphone une dernière fois avant de dormir puisqu’on l’a laissé (sciemment) dans la cuisine/salon/entrée…

En résumé condensé le sommeil se prépare… pendant la journée. Et de la qualité et la régularité de notre sommeil dépendent notre santé. En effet, le Journal of the American Heart Association vient de publier des résultats évoquant des risques cardio-vasculaires plus accrus chez les personnes ayant un rythme de sommeil irrégulier.

  Et si ce trouble du sommeil concerne votre ado, peut être faut-il creuser plus loin et se poser les questions de l’environnement… les écrans, du harcèlement, un contexte difficile ? On en parle ici :

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